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22/06/2025

Pourquoi j ai failli ne plus remonter à cheval.

Bon cet article vient du coeur, ce ne sera pas un article structuré et on est pas non plus sur un article éducatif mais je me dis que je ne dois pas être la seule dans cette situation et ce cheminement que j'ai eu dans ma tête et dans mon coeur aidera peut etre certaines d'entre vous qui sont dans la même situation que moi.

Cheval calme et attentif au travail avec sa cavalière, illustrant une relation basée sur l’écoute et le consentement

Quand je suis revenue dans le monde du cheval en tant qu’adulte, je ne m’attendais pas à ce que ce soit si différent, je pensais que ça allait être comme avant, comme quand j’étais enfant ou ado, avec ce plaisir simple de monter, de galoper, de progresser. Je n’avais pas prévu que ça allait remuer autant de choses pourtant, ça a été un vrai choc… Je ne voyais plus les chevaux de la même manière et surtout, je ne me voyais plus, moi, cavalière, de la même façon.

Petite, j’ai été formée dans une équitation assez classique, on ne remettait pas grand-chose en question. Un cheval qui disait non, on disait qu’il testait, qu’il faisait sa mauvaise tête, que c’était pour nous embéter. Il fallait cadrer, corriger, montrer qui décidait et lui faire comprendre qu’il n’avait pas le choix (mon dieu j’ai mal rien que de l’écrire…). Bref on ne m’a jamais parlé d’écoute, on ne m’a jamais appris à regarder un cheval autrement que comme un animal, un outil, un être certes vivant, mais au service d’un objectif, de mon objectif.

Et en revenant, des années plus tard, en tant que femme, en tant que maman, en tant qu’éleveuse aussi, quelque chose a changé dans mon regard. J’étais plus sensible à certaines choses, plus disponible aussi, plus curieuse peut-être et j’ai commencé à remarquer des choses que je n’avais jamais vues avant, des détails dans les yeux, dans les postures, dans la tension du corps, dans la respiration. J’ai commencé à comprendre que les chevaux communiquent sans arrêt, que leurs corps parlent, que leurs silences sont bavards.

Et là, je me suis pris une claque et j’ai repensé à toutes ces années où j’étais passée à côté de tout ça. À toutes les fois où j’avais demandé sans me demander. À tous les chevaux à qui j’avais imposé des choses sans même me poser la question de leur confort, de leur envie, de leur capacité à répondre à ce que je leur demandais…

Et au final je n’ai plus eu envie de monter, c’était comme si quelque chose s’était brisé. Je ne pouvais plus me dire “je vais le faire travailler”, parce que ça sonnait faux, parce que j’avais l’impression d’imposer quelque chose à un être vivant qui n’avait rien demandé. Je n’avais plus envie de ça. Je ne voulais plus forcer. Je ne voulais plus fermer les yeux. Alors j’ai arrêté. J’ai passé du temps avec les chevaux autrement, à pied, sans but, juste être là, observer, sentir, ressentir, apprendre à regarder autrement.

Mais en même temps, je suis éleveuse donc je vends des chevaux… Et je sais très bien qu’ils vont être montés, que les gens qui les achètent vont vouloir faire de la compétition puisque ce sont des chevaux de sport. Alors je me suis dit qu’il fallait que je trouve une voie et que je me réconcilie avec cette pratique que j’avais aimée, mais que je ne reconnaissais plus.

Et c’est venu doucement, presque sans faire exprès. J’ai eu deux enfants, et avec ça, mon corps a changé et il fallait que je remette au sport, et en faisant du sport pour moi, j’ai compris que je ne le faisais pas pour “retrouver la ligne” ou atteindre un objectif esthétique, mais tout simplement pour aller bien, pour ne pas avoir mal, pour retrouver de la force, pour respirer mieux, pour être à l’aise dans mon corps, pour mieux vieillir. Et je me suis dit : mais pourquoi ce serait différent pour le cheval ? Pourquoi est-ce qu’on ne pourrait pas faire du sport ensemble, lui et moi, pour les mêmes raisons ? Pour qu’il se sente bien dans son corps et dans sa tête, pour qu’il gagne en mobilité, en souplesse, en tonus. Pour qu’il vive mieux, plus longtemps, plus sereinement. Pour qu’il touche à tout, qu’il apprenne pleins de choses, qu’il assouvisse son besoin d’explorer et de découvrir.

Et c’est là que tout a changé, dans ma tête d’abord, puis dans ma façon de monter. Je me suis mise à leur parler, à expliquer ce que je faisais, pourquoi je le faisais. Je me suis mise à passer plus de temps avec eux avant la séance, après aussi, à chercher leur regard, à observer leur respiration, à écouter ce qu’ils me disaient avec leurs corps, avec leurs silences et leurs micro-expressions.

Je ne pars plus du principe que le cheval est toujours d’accord, je ne m’énerve plus quand il refuse, je cherche à comprendre ce qu’il se passe dans sa tête et comment je pourrais l’aider. Je me dis que s’il ne veut pas, c’est qu’il ne peut pas. Et dans ce cas, ce n’est pas à lui de changer, c’est à moi d’adapter… peut-être que ce n’est pas le bon jour, peut-être que c’est trop difficile, peut-être qu’il y a quelque chose qui coince, peut-être qu’il n’a pas compris. Et dans ce cas, ce n’est pas à lui de “se mettre au travail”, c’est à moi de revoir ma façon d’amener les choses.

Et ce qui m’a le plus marquée, c’est de réaliser à quel point certains chevaux disent “non” très fort… et à quel point d’autres ne disent rien. Ils encaissent, ils continuent, ils font ce qu’on leur demande, sans un mot, sans un geste. Et puis un jour, ils s’éteignent, ils deviennent mous, ou douloureux, ou malades. Ceux-là, on les croit “faciles”, mais ce sont souvent ceux qu’on entend le moins, et qu’on abîme le plus.

Depuis que j’ai compris ça, je fais différemment, je ne cherche plus à avoir une séance “productive”, je cherche à avoir une séance juste. Juste pour lui. Juste pour moi. Je veux qu’on soit bien ensemble et qu’il comprenne ce que je lui propose. Et s’il ne comprend pas, ce n’est pas lui qui est “bête” ou “paresseux”, c’est moi qui n’ai pas bien expliqué ou qui n’ai pas vu qu’il n’était pas prêt.

Et je ne dis pas que j’ai tout compris, je ne dis pas que je suis parfaite mais je pense que je me pose les bonnes questions, je m’interroge, je reste ouverte et je m’adapte. Parce que chaque cheval est différent et que chaque relation est unique.

Aujourd’hui, je suis remontée à cheval et je m’y sens bien. Je n’ai plus ce tiraillement parce que je sais pourquoi je le fais et surtout, je sais comment je le fais. Je ne veux plus imposer, je veux proposer, je ne veux plus contraindre, je veux accompagner, je ne veux plus dominer, je veux dialoguer.

Et je suis convaincue qu’on peut avoir une équitation exigeante, technique, sportive… sans jamais écraser. Je crois qu’on peut faire progresser un cheval sans lui faire peur, qu’on peut le muscler sans le contraindre et qu’on peut le faire avancer sans jamais le trahir.❤️

Parce que finalement, monter à cheval, c’est comme faire du sport avec un partenaire. Il y a des jours où on est motivés, d’autres moins, des jours où on peut pousser un peu, et d’autres où il faut ralentir mais ce qui compte, c’est qu’on reste ensemble, qu’on avance dans le même sens et qu’on se respecte, profondément.

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